Pourquoi y a-t-il un Dakota du Nord et un Dakota du Sud ? Après tout, ces deux États partagent une histoire commune, des paysages similaires et une culture enracinée dans l’héritage amérindien et la conquête de l’Ouest. Pourtant, depuis 1889, ils existent séparément sur la carte des États-Unis. Cette division n’est pas due au hasard : elle résulte de rivalités politiques, économiques et stratégiques qui ont façonné l’histoire américaine. Plongeons dans les coulisses de cette séparation pour comprendre pourquoi un seul Dakota ne suffisait pas.
Tableau des différences entre le Dakota du Nord et du Sud
Critères | Dakota du Nord | Dakota du Sud |
Capitale | Bismarck | Pierre |
Ville principale | Fargo | Sioux Falls |
Économie principale | Pétrole, agriculture, élevage | Services financiers, tourisme, agriculture |
Tourisme | Moins touristique, mais présence du Theodore Roosevelt National Park | Mont Rushmore, Badlands, Deadwood |
Population (approx.) | 770 000 habitants | 920 000 habitants |
Climat | Hivers très froids, climat continental | Climat plus tempéré mais toujours continental |
Orientation politique | Très conservateur, vote souvent républicain | Conservateur mais plus modéré, également républicain |
Attractivité économique | Croissance grâce au pétrole, mais faible diversification économique | Diversifié avec le tourisme et la finance, plus attractif démographiquement |
Les origines du territoire du Dakota
Un territoire unifié sous le nom de “Dakota”
Avant de devenir deux États distincts, le Dakota formait une seule entité administrative. En 1861, le gouvernement fédéral des États-Unis crée le territoire du Dakota, qui englobe une vaste région s’étendant bien au-delà des actuels Dakota du Nord et du Sud, incluant même des parties du Montana et du Wyoming. À cette époque, cette région est encore largement peuplée par les tribus amérindiennes, notamment les Sioux Lakota, qui dominent ces terres depuis des siècles.
La présence de colons européens est alors limitée, se concentrant autour de quelques forts militaires et missions religieuses. La majorité de la population est composée de peuples autochtones, et les tensions entre Amérindiens et colons s’intensifient au fil des années, notamment avec l’arrivée massive de nouveaux habitants attirés par les promesses de terres gratuites et de ressources naturelles.
L’expansion vers l’Ouest et l’essor du Dakota
Dans les années 1870 et 1880, le développement du chemin de fer transcontinental transforme radicalement le territoire du Dakota. La construction de voies ferrées permet d’accéder plus facilement aux Grandes Plaines et facilite l’installation de colons venus principalement du Midwest et d’Europe. L’agriculture, en particulier la culture du blé et l’élevage, devient rapidement le moteur économique de la région.
Par ailleurs, la découverte d’or dans les Black Hills (actuel Dakota du Sud) en 1874 déclenche une ruée vers l’or, attirant des milliers de prospecteurs et intensifiant les tensions avec les Sioux, qui considèrent cette région comme sacrée. Le territoire du Dakota devient alors une zone stratégique et convoitée, accélérant sa structuration et son peuplement.
Au fil des années, le Dakota devient suffisamment peuplé et économiquement stable pour prétendre à son intégration en tant qu’État des États-Unis. Mais au lieu de devenir un seul et unique État, il sera divisé en deux entités distinctes. Pourquoi ? C’est ce que nous allons voir dans la prochaine partie.

Une séparation motivée par des raisons politiques et économiques
Une rivalité entre le Nord et le Sud du Dakota
À mesure que le territoire du Dakota se développe, des différences notables émergent entre le Nord et le Sud. Le Dakota du Sud se peuple plus rapidement, notamment grâce à l’exploitation agricole et à la ruée vers l’or dans les Black Hills. Des villes comme Sioux Falls deviennent des centres économiques majeurs. En revanche, le Dakota du Nord, plus froid et plus rural, reste plus orienté vers l’agriculture et l’élevage, avec des villes comme Bismarck et Fargo qui se développent à un rythme plus lent.
Cette disparité alimente une rivalité croissante, notamment sur le choix de la capitale du territoire. Bismarck, située au Nord, est désignée comme capitale en 1883, ce qui suscite du mécontentement dans le Sud, où de nombreux habitants auraient préféré voir Sioux Falls jouer ce rôle. Cette tension régionale devient un argument de plus en faveur de la séparation.
L’implication du Parti républicain
Si des considérations économiques et démographiques expliquent en partie la division du Dakota, la véritable raison derrière cette séparation est avant tout politique. À la fin du XIXᵉ siècle, le Parti républicain domine la scène politique américaine et cherche à renforcer son pouvoir au Congrès. Or, en transformant un seul territoire en deux États distincts, les Républicains peuvent doubler leur représentation au Sénat, passant de deux sièges à quatre.
Cette stratégie n’est pas nouvelle : les États-Unis ont souvent utilisé la création d’États pour équilibrer le pouvoir politique entre Républicains et Démocrates. Dans le cas des Dakota, la séparation permet aux Républicains de s’assurer une plus grande influence, car la région est alors largement acquise à leur parti.
L’admission officielle en 1889
Face à ces enjeux économiques et politiques, le Congrès adopte en 1889 l’Enabling Act, une loi qui prévoit l’entrée de plusieurs nouveaux États dans l’Union, dont le Dakota du Nord, le Dakota du Sud, le Montana et Washington. Le 2 novembre 1889, le président Benjamin Harrison signe officiellement les documents faisant des deux Dakota des États indépendants.
Un détail amusant entoure cet événement : afin d’éviter toute querelle sur la primauté d’un État sur l’autre, Harrison mélange les documents avant de les signer, ce qui fait que personne ne sait vraiment si le Dakota du Nord ou le Dakota du Sud est devenu un État en premier !
Avec cette séparation, les deux nouveaux États prennent des trajectoires différentes, bien que partageant encore une culture et une histoire commune. Dans la prochaine partie, nous verrons comment cette division influence encore aujourd’hui leur identité et leur développement.

Deux États aujourd’hui bien distincts
Bien que le Dakota du Nord et le Dakota du Sud partagent une histoire commune, leurs trajectoires économiques et culturelles ont pris des directions différentes depuis leur séparation en 1889. Le Dakota du Nord est aujourd’hui largement tourné vers l’industrie pétrolière, l’agriculture et l’élevage. Grâce aux gisements de pétrole de la formation de Bakken, l’État a connu un véritable boom économique au cours des dernières décennies, attirant de nouveaux habitants et stimulant la croissance de villes comme Fargo et Bismarck. Il conserve cependant une image plus rurale et moins touristique que son voisin du Sud.
De son côté, le Dakota du Sud est devenu un centre touristique majeur, notamment grâce à des sites emblématiques comme le Mont Rushmore, les Badlands et la ville historique de Deadwood. L’État s’est aussi diversifié économiquement en attirant des entreprises du secteur financier et des services. Sioux Falls, la plus grande ville de l’État, est aujourd’hui un pôle économique important. Plus dynamique démographiquement, le Dakota du Sud est souvent perçu comme plus ouvert et attractif, tandis que le Dakota du Nord reste plus conservateur et agricole. Malgré ces différences, les deux États conservent une identité commune marquée par les grands espaces, la culture western et l’héritage amérindien.